Premier Jour sur cette 36ème édition des Transmusicales de Rennes et pour ceux qui ont suivi nos différentes recommandations, sachez que nous n’avons pas forcément pu voir tous les groupes que nous avions prévu de découvrir. En contre partie, nous avons déniché quelques artistes supplémentaires, mus par une volonté féroce de repérer les nouveaux talents de demain et de vous faire partager nos joies et nos déceptions.


17H45 – DEAD OBIES


Dead Obies, photo Titouan Massé - Transmusicales de Rennes
Dead Obies, photo Titouan Massé – Transmusicales de Rennes

Comme convenu, nous commençons la journée en allant voir nos cousins de Montréal, les 5 MCs de Dead Obies et visiblement nous ne sommes pas les seuls puisque l’Ubu affiche un beau taux de remplissage et que, c’est la spécificité de cette salle mythique, la moitié du public ne voit pas la scène et profite tranquillement du concert grâce à un écran géant intelligemment placé à proximité de l’entrée. Le groupe réussit son entrée sur scène avec un son paradoxalement très west coast (Montréal se situant sur la côte est de l’Amérique du Nord, nous en sommes tous conscients). Dès les premiers titres, outre les beats puissants et efficaces et les prods proches de celles du bon docteur Dre, c’est la cohésion du groupe et sa complémentarité qui frappe. Flows rapides à la Busta ou voix grave à la limite du dancehall, les timbres et les débits s’entremêlent avec bonheur. Le seul bémol sera résumé très diplomatiquement par mon voisin de gauche : « il faut un décodeur ». Certes on ne comprend pas tout de ce que raconte le groupe qui rappe en franglais et parfois même en créole (dixit leur page wikipédia donc source sûre) mais voilà quand parfois une phrase fuse, claire comme de l’eau de roche, « Donne moi ta fucking réponse » par exemple, là c’est le bonheur de ceux qui ont su attendre leur tour pour choisir un chocolat dans la boîte et qui tombent sur le meilleur. Pour être tout à fait complet, les costumes de scène, globalement des combinaisons de garagistes et un masque de snowboard vissé sur le bonnet pour le DJ soulignent la solidarité du groupe avec sobriété, ici tout le monde est logé à la même enseigne. « Normalement on ne joue pas avant minuit le soir mais pour vous on fait une exception », merci les gars et la prochaine fois c’est promis on ira vous voir jouer dans un petit club, tard et de préférence dans un quartier de Montréal $ud.


18H30 – BISON BISOU


Bison Bisou, photo Titouan Massé - Transmusicales de Rennes
Bison Bisou, photo Titouan Massé – Transmusicales de Rennes

De l’Ubu à la salle de l’Étage il n’y a que quelques centaines de mètres que nous parcourons au pas de course pour ne pas louper l’entrée en scène des Bison Bisou. Ce début d’effort est récompensé par une entrée en matière tonitruante des Lillois. Le duo de guitares (Télécaster et SG pour les amateurs) fonctionne parfaitement et la session rythmique rudement solide permet aux deux guitaristes d’enchaîner les petits plans à l’aigu sans perdre en intensité, ce qui, dans le post-punk, est plutôt bienvenu. Pour le reste, le groupe fonctionne à l’énergie mais c’est aussi sa limite. Les titres s’enchaînent et on peine à trouver une ligne mélodique qui permette de différencier une chanson de l’autre et qu’on pourrait ramener chez soi et siffloter sous la douche si on est vraiment, vraiment de bonne humeur le matin. En revanche, pour tous les fans du groupe At the Drive-In, ne loupez pas un concert des Bison Bisou, vous retrouverez dans la gestuelle du chanteur tout ce que vous aimiez chez Cédric Bixler. Pour les autres, on vous recommandera d’écouter un leur musique avant d’aller les découvrir sur scène pour passer un bon moment. Notons enfin pèle-mêle : que le chanteur ressemble terriblement à Dustin Hoffman dans Marathon Man, qu’il manque encore un peu d’ampleur quand il fait tourner le câble du micro autour de lui mais qu’il est très efficace pour éclairer à la frontale les membres de son groupe lancés dans une fin de morceau apocalyptique et bien sûr que le batteur peut abattre des arbres rien qu’en tapant sur sa caisse claire. Il finira d’ailleurs par tomber la chemise quelques morceaux avant la fin du concert, ce qui en dit long sur son engagement physique tout au long du set.


19H – RICH AUCOIN & ENCORE !


Rich Aucoin, photo Titouan Massé - Transmusicales de Rennes
Rich Aucoin, photo Titouan Massé – Transmusicales de Rennes

Retour à l’Ubu en quatrième vitesse pour retourner profiter du Focus Canada et de la création inédite de Rich Aucoin pour les Trans. À notre arrivée, l’artiste d’Halifax en Nouvelle-Écosse en est à son troisième morceau et déjà il chante au milieu du public, monte dans les gradins, éclaire les spectateurs avec une ampoule : ça créer des liens. À peine remonté sur scène, il décide de faire chanter le public et en français dans le texte. C’est d’ailleurs une des spécificités de Rich qui, bien que visiblement anglophone, aime à écrire des refrains simples et en français « ils sont partis », « désolé » etc… C’est pratique pour communier, ça permet de confirmer que notre langue fonctionne sur de la pop indie mais vachement mieux quand ce sont les canadiens qui le font. Le concert continue avec une belle énergie, de la simplicité et du groove. C’est un show total, les projections vidéos, des extraits de films ou d’émissions télé, sont drôles et rythment parfaitement le set. Rich est accompagné d’une session rythmique efficace, c’est l’objet de cette création et c’est une très bonne initiative car elle permet au chanteur de se libérer et donne encore plus de relief et d’intensité aux morceaux. Côté images, mention spéciale pour le montage de tous les « I’m sorry » présents dans les films américains et l’introduction du titre jouée sur la scène des retrouvailles entre Indiana Jones et Marion dans « Les aventuriers de l’arche perdue ». Nous resterons en revanche plus mesurés concernant l’utilisation du Allô de Nabilla dont nous espérions franchement qu’il n’avait pas traverser l’Atlantique mais là encore Rich a de quoi se faire pardonner puisque juste avant, il avait utilisé, toujours pour ses liaisons en images, des archives de Julio Iglesias et ça, ça fait chaud au coeur.


22H30 – TWO BUNNIES IN LOVE


Two Bunnies in Love,  photo Titouan Massé - Transmusicales de Rennes
Two Bunnies in Love, photo Titouan Massé – Transmusicales de Rennes

Après être allé sagement chercher les pass qui permettent d’accéder à tous les concerts des Bars en Trans et non sans avoir profité d’une bonne crêperie du centre ville, nous arrivons au Dejazet pour le concert des Two Bunnies In Love. Malgré quelques protestations légitimes de festivaliers mécontents que l’entrée soit payante (5€) en plus de l’achat du pass susmentionné, le bar est plein. Le public semble impatient de découvrir les nouveaux morceaux du groupe, qui, précisons-le, n’y est pour rien dans cette surtaxe. Dès le début les normands marquent les esprits avec une excellente version de leur titre « Duchesse » et on est surpris de la précision du son, de son ampleur dans une salle grande comme le salon d’une colloc. Les premiers titres s’enchaînent avec efficacité mais dans une relative timidité qui ne manque toutefois pas de charme si j’en crois les commentaires des trois jeunes filles qui minaudent devant moi. Je constate alors que l’audience est à 70% féminine, pas forcément très majeure et parfaitement conquise par les mélodies et l’énergie des chansons ce qui donne une ambiance bienveillante à ce début de concert. Pour le reste les deux guitaristes font des merveilles, ils se répondent et se complètent. Les frères Valéro pour la session rythmique amènent du groove et de la précision au tout et la voix du chanteur Julien est toujours si emballante (toujours avec l’assentiment de mes voisines). Après la tournée Ricard S.A Live Sessions dans les plus belles salles de France, le groupe ne souffre pas de se retrouver sur une petite scène, au contraire, peu à peu l’ambiance monte : la reprise « I’m The Fly » réchauffe franchement l’atmosphère puis, après les nouveaux titres « Holy Visions » et « Precious Time », c’est « Washington » qui finit de convaincre le public. C’est le rappel, les fans réclament « You & Me », ils seront entendus. À noter : dans les quatre titres que jouent le groupe pour prolonger le plaisir, les versions acoustiques et épurées des titres « Duchesse » et « Manchester » permettent de redécouvrir la qualité de composition du groupe et toujours, le guitariste/pianiste Thibault qui double toutes les voix et épaule avec brio son frère, le chanteur Julien.


00H05 – KATE TEMPEST


Kate Tempest, photo Titouan Massé - Transmusicales de Rennes
Kate Tempest, photo Titouan Massé – Transmusicales de Rennes

Le temps de retrouver la RicardsaLiveMobile dans le parking et nous voilà partis pour le Parc Expo de Rennes et son enchaînement de Halls. C’est au pas de course là encore que nous arrivons pour la fin du concert de Kate Tempest. Inutile de la chercher à l’avant de la scène puisqu’elle est alors assise à la place de son batteur et qu’elle pose son flow sur un rythme simple mais qui semble ravir le public. Fille d’un père ouvrier qu’elle a vu trimer dans les cours du soir pour devenir avocat, éduquée dans le sud-est de Londres dans une famille de cinq enfants et dans un quartier qu’elle qualifie elle-même « d’un peu merdique », c’est cette Angleterre fière et prolétaire qu’elle incarne instantanément. Elle raconte avec humour le quotidien de la jeunesse britannique dans un style proche de celui de Mike Skinner (The Streets) et avec un flow qui n’est pas sans rappeler l’énergie des Beasties Boys. Mais voilà, nous arrivons un peu tard et nous n’aurons pas le temps de beaucoup profiter des chroniques de Kate, à peine d’un titre expérimental, à la frontière du hardcore hip-hop et d’un dernier morceau plus calme, chanté, pas toujours très juste, mais avec une émotion sincère et c’est bien là le principal. Il y a certes des imprécisions dans l’exécution, tout n’est pas réussi mais la jeune fille ne manque ni d’idées d’arrangements, ni d’inspiration. En un mot comme en cent : elle est touchante.


00H28 – RAURY


Raury, photo Titouan Massé - Transmusicales de Rennes
Raury, photo Titouan Massé – Transmusicales de Rennes

Malheureusement nous ne dirons pas grand chose de Raury, pas cette fois en tout cas. Si nous avions, comme beaucoup, placé nos espoirs dans celui qu’on présentait avec son excellent titre « God’s Whisper » comme un multi-instrumentiste prodige de 17 ans, ce que nous avons vu ce soir n’avait  rien de prodigieux. Cueillis à froid en entrant dans le Hall 8 par une très mauvaise reprise de « Smells Like Teen Spirit » de Nirvana, qui, pour ceux qui ont vécu leur adolescence dans les années 90 et qui connaissent l’histoire des Trans fait doublement de la peine. Quelques sifflets fusent et j’entends un très violent « mais qu’est-ce que c’est ça, c’est la fête de la musique ». Ensuite ? Ensuite rien de grave seulement un jeune homme de dix sept ans qui voit un peu trop grand, qui décide de jouer ses titres plutôt hip hop, folk et groovy avec un trio de métalleux pas très inspirés qui étouffe toute la richesse de ses compositions (un guitariste avec une Ibanez, c’est rarement bon signe). Impossible du coup d’entendre sa voix, on ne perçoit que son timbre encore adolescent, c’est dommage. Pas de découverte sans prise de risque, Raury l’a compris puisqu’il sort de scène sur un périlleux backflip. A dix-sept ans on n’est pas toujours sérieux mais on a l’avenir devant soi, Raury a raté ce rendez-vous, espérons qu’il ne rate pas les prochains.


01H15 – A-WA


A-WA, photo Titouan Massé - Transmusicales de Rennes
A-WA, photo Titouan Massé – Transmusicales de Rennes

C’est la magie des Transmusicales : pouvoir profiter d’un moment de douceur avec les trois soeurs Haim et leur folk israélo-yéménite. Malheureusement nous ne pouvons pas rester tout le concert car il nous faut reprendre la route et rentrer écrire ces quelques lignes. Mais nous avons le temps toutefois de profiter de quelques chansons d’amour, de jolis moments de communion avec le public et d’un superbe Keytar multicolore. Le groupe avait l’air heureux et ému d’être sur scène, le public vibrait au diapason, c’était une bonne idée pour finir la soirée, à demain les amis.